Quand on parle de l'histoire, on pense toujours aux leçons qu'on peut tirer des erreurs commises. Les leçons sont d'autant plus poignantes s'il y a eu des morts. Nous pouvons parler de ce que nous avons appris des révolutions américaine et française, ou peut-être des nombreuses guerres civiles. Il y avait des leçons tristes dans les deux guerres mondiales. La révolution communiste en Russie et la Terreur en France sont des leçons un peu comme l'Holocauste. Nous nous demandons probablement pourquoi. Pourquoi les hommes et les femmes ont besoin de mourir pour que nous trouvions ce que nous n'avons pas fait ou ce que nous ferons différemment à l'avenir. La Commune de 1871 à Paris a engendré des morts et des leçons, mais ces leçons ne sont pas aussi claires que celles des grandes guerres. La France n'aime pas beaucoup parler de la Commune, mais Karl Marx l'a aimée. Je me demande quelles idées se trouvent dans la mort de ces gens de Paris. Je veux les découvrir, les idées révolutionnaires et celles qui sont moins à gauche. Je veux voir ce que ce massacre humain nous apporte aujourd'hui, s'il nous apporte quelque chose.

Je pense qu'il serait bien de donner un bref récit de ce qui s'est passé en 1871 pour expliquer la formation de la Commune. La France a combattu la Prusse lors d'une guerre très courte qui a débuté en juillet 1870. Les Prussiens ont remporté plusieurs victoires et Napoléon III a été fait prisonnier avec près de 100 000 hommes de l'armée française en septembre. Les Prussiens étaient aux portes de Paris le 19 septembre, puis ils ont entamé le siège. Le 28 janvier 1871, Paris a finalement capitulé. Cependant, il y avait des citoyens à Paris qui refusaient d'accepter le nouveau gouvernement de Thiers et les conditions de paix avec la Prusse. Les soldats que Thiers avait envoyés pour maintenir l'ordre se sont retournés contre le gouvernement, et les généraux Thomas et Lecomte ont été exécutés. À ce moment-là, le 19 mars, la Commune a été créée, formant ainsi un gouvernement de gauche composé d'ouvriers. La Commune de Paris a inspiré d'autres villes comme Lyon, Toulouse, Marseille, Narbonne et Saint-Étienne à envisager la formation d'une commune locale. Cependant, ces autres communes n'ont pas eu le même pouvoir ni le soutien que celle de Paris.

On aurait peut-être pu remporter une grande victoire si les communards s'étaient attaqués aux positions de l'armée à Versailles, mais la Commune n'était pas suffisamment bien organisée. Ensuite, les forces de Versailles ont bombardé Paris le 2 avril. On a essayé de voter des lois telles que la séparation de l'État et de l'Église, ainsi qu'un salaire universel pour les ouvriers et les fonctionnaires. Les idées de la Commune étaient des idées de gauche. Les participants étaient principalement des ouvriers des grandes villes. Les gens de la campagne n'avaient pas les mêmes idées révolutionnaires que les gens des grandes villes. Les journaux qui s'opposaient à la Commune ont été supprimés par celle-ci au cours du mois de mai.

Les résultats immédiats n'étaient pas très favorables pour les communards. La semaine du 21 au 28 mai a été une semaine sanglante. Il n'y a pas de nombre précis de décès pendant cette semaine. On a initialement parlé de 6 500 à 40 000 morts, mais aujourd'hui on estime qu'il y a eu entre 20 000 et 25 000 morts. C'était plus que pendant la Terreur et plus que lors de la révolution d'octobre dirigée par Lénine en Russie. Environ 40 000 prisonniers de la Commune ont été faits, parmi lesquels certains ont été exécutés, d'autres envoyés en Nouvelle-Calédonie (7 000) ou en Afrique. Au fil des années, la France, qui souhaitait oublier la Commune, a également oublié les prisonniers communards qui étaient encore en détention.

La destruction matérielle était immense également. La France avait besoin de verser une indemnité d'un milliard de dollars à la Prusse. Les partisans de la Commune ont incendié et détruit de nombreux bâtiments à Paris, tels que "le Palais-Royal, le ministère des finances, la rue de Rivoli, la rue Royale... la porte Sainte-Martin,.. l'Hôtel de ville, la Bastille et Bercy." Ils ont également détruit la colonne de Vendôme et la maison de Thiers. Une histoire un peu drôle est que Gustave Courbet a été reconnu coupable et condamné à payer pour le remplacement de la colonne de Vendôme, mais il a quitté la France pour la Suisse. Ainsi, l'un des résultats de la Commune était une pression économique sur l'État, qui se trouvait déjà en difficulté financière en raison de la guerre. Un autre résultat était la perte de la moitié des peintres de maisons, des plombiers, des travailleurs du zinc, ainsi que des fabricants de tuiles et de chaussures. Par conséquent, l'industrie parisienne a souffert pendant plusieurs années après la Commune.

Je souhaite me concentrer sur les effets intellectuels plutôt que physiques de la Commune. En France, comme je l'ai déjà mentionné, on voulait oublier la Commune. Manet a dessiné les communards morts aux barricades. Lissagaray a écrit Les huit journées de mai et Lepage a écrit Histoire de la Commune. L'impressionnisme, avec toutes ses couleurs, n'a pas reflété la tristesse de la Commune. La France travaillait dur et a rapidement remboursé l'argent à la Prusse. En 1874, il y avait encore des exécutions de communards à Paris, mais en 1880, une amnistie complète a été accordée à tous les communards. Après cela, on ne parlait pas beaucoup de la Commune en France, ni à Paris. On a dit que la Commune prouvait "que le vieux monde est bien fini, que tout retour au passé est impossible." Mais cela aurait été vrai même sans les morts de la Commune, à mon avis. Il y a toujours des pèlerinages français et internationaux de gens de gauche qui se rendent au mur des Fédérés à Paris. Ces personnes sont souvent des communistes. Les étudiants parisiens en 1968 ont également crié "Vive la Commune" dans les rues, mais le résultat a été un peu moins sanglant.

Ici, il est presque impossible de trouver quelqu'un qui sait ce que signifie la Commune de Paris. J'ai consulté trois encyclopédies des États-Unis et très peu est dit sur la Commune. Mon exemplaire du World Book n'en parle pas du tout, et le Compton's ne mentionne pas les morts de la Commune, dans les huit phrases qui évoquent les événements de 1871. Alors, que suis-je en train de dire ? La Commune est un événement important pour les personnes de gauche, en particulier les communistes, et ce qui est important pour les communistes est évité ici. Je pense pouvoir affirmer que la Commune n'a presque aucune influence aux États-Unis, et probablement pas non plus dans le reste de l'Amérique du Nord ou de l'Amérique du Sud, à l'exception de Cuba, je pense.

Maintenant, nous nous demandons où se trouve l'influence de ces 20 000 hommes et femmes, ou plus, qui sont morts en 1871. Karl Marx a vu la Commune sous un angle différent du nôtre. Il pensait que c'était la première fois que les ouvriers avaient jamais eu du pouvoir au gouvernement. La Commune n'a probablement pas changé ses idées, mais elle a offert l'occasion de voir comment le peuple peut se gouverner, même pendant un mois. Marx a écrit La guerre civile en France juste après la fin de la Commune. Dans les yeux de Marx, la Commune était un bon point de départ pour la grande révolution paysanne qui ferait "le tour du monde". Selon Marx, les Communes qui se propageraient dans le monde entier seraient des gouvernements de transition conduisant à un nouvel ordre où les paysans et les ouvriers seraient au pouvoir. Ici, nous dirions qu'il n'est pas nécessaire d'avoir ce type de révolution pour établir un gouvernement par le peuple. Les communistes pensent qu'une révolution comme celle des communards doit être une révolution permanente.

Lénine a voulu cette révolution permanente. Il a utilisé les idées de la Commune pour soutenir son concept d'un nouveau gouvernement très fort qui prendrait le pouvoir. Les bourgeois ne céderaient pas facilement leur gouvernement aux paysans. Lénine a appris de la Commune qu'il fallait tuer ou être tué, et qu'il était impossible de changer les opinions de nos ennemis. Il a également compris qu'il était impossible de tenter de sauver le pays (comme la France contre la Prusse) tout en se révoltant contre le gouvernement. Alors que Marx souhaitait laisser aux paysans la création du nouveau gouvernement, Lénine voulait lui-même contrôler cette création. Dans la Russie après la révolution communiste, on a associé les soviétiques aux communards de Paris. On a pensé que le gouvernement en Russie était un descendant direct de la Commune de Paris.

L'Angleterre a connu un effet immédiat en raison de sa proximité avec Paris et de ses liens avec des syndicats internationaux. Karl Marx était également en Angleterre pendant la crise en France. Après la Commune, les ouvriers anglais n'ont pas oublié les morts en France. C'était une représentation de nous contre eux pour les ouvriers anglais, ainsi que pour de nombreux ouvriers du monde entier. En Norvège, qui entretenait toujours de forts liens avec l'Angleterre, quelques écrivains, notamment Ibsen et Nordhal Grieg, ont écrit sur cette révolution quelque peu mystérieuse. Grieg a écrit sa pièce, "La Défaite", en 1937, mais elle n'a pas été traduite en français. Un autre homme du nord, Berthold Brecht d'Allemagne, a écrit "Jours de la Commune" après avoir lu celle de Grieg. Ibsen et Grieg ont essayé d'utiliser cette révolte française pour inspirer une révolution en Norvège.

La Chine est un pays communiste qui accueille, tout comme l'a fait l'Union soviétique, les idées de la Commune. Un historien, Li Shu, a écrit que le gouvernement chinois considérait que la Commune avait la même importance que la révolution en Russie. On a tenté de mettre en place des modèles de la Commune dans deux grandes villes de Chine en 1967, mais ils n'ont pas fonctionné. La presse officielle chinoise a ensuite déclaré que la Commune était un modèle pour la révolution mondiale, mais pas pour une utilisation ultérieure après cette révolution. Mao Zedong était d'accord avec Staline sur la nécessité d'une révolution visant à détruire le pouvoir militaire et la bourgeoisie, pour ensuite établir une dictature du prolétariat. Il pensait également qu'il y avait une ligne de succession qui partait de la Commune en France, puis de la révolution en Russie, et maintenant de la révolution en Chine. La Chine est restée fidèle au communisme de Staline, qu'il disait avoir tiré de la Commune, mais le communisme en Russie l'a modifié.

Tous les livres que j'ai trouvé sur la Commune sont anciens. Plusieurs éditions ont été publiées en 1971 pour la commémoration du centenaire. Il est probable qu'en 2071, nous aurons de nombreux nouveaux textes à ce sujet. Ici, en Amérique, nous ne parlons pas de la Commune. Ma sœur, qui sera enseignante de français l'année prochaine, ne sait rien de la Commune, tout comme mon père, qui pense qu'il sait tout. Avec la disparition du communisme, chaque génération sera de moins en moins nombreuse à apprendre les exploits de ces révolutionnaires parisiens. J'entends souvent dire qu'il est difficile de se fier à ce que disent les sources primaires, mais je pense que c'était Marx et Lissagaray qui savaient ce qui s'était réellement passé à Paris, pas les communistes de Russie ou de Chine. Pourquoi ? Parce que lorsqu'un peuple se révolte, il veut la démocratie, le suffrage universel et un gouvernement par et pour les masses. La Commune, dans sa forme pure, était un exemple de ces idées ; les gouvernements de l'Occident les ont éliminées, et les communistes les ont modifiées. Donc, est-ce que la Commune nous apporte quelque chose ? Je pense que non, et je trouve cela un peu triste.